Par Peter H. Spectre - L'histoire du renouveau du bateau en bois aux Etats-Unis est pour nous d'autant plus instructive que ce mouvement s'est amorcé outre-Atlantique dès le milieu des années soixante, soit une bonne vingtaine d'années avant qu'il ne se manifeste en France. On est donc tenté de profiter de ce décalage pour lire cette histoire américaine comme une sorte d'anticipation de la nôtre. Pourtant, les ressemblances ne sont que de surface et à y regarder de plus près, ce sont surtout les différences qui sautent aux yeux; Peter H. Spectre - l'un des piliers de la revue WoodenBoat - montre bien que ce mouvement puise sa sève dans un terreau cultivé bien avant la société de consommation et les réactions qu'elle a engendrées. Rien de tel en France où les défenseurs du patrimoine maritime relèvent presque de la génération spontanée, tant était grand le vide intellectuel qui les avait précédés. Il nous a manqué un historien maritime qui, comme Howard Chapelle, s'intéresse aux bateaux de travail à une époque où il était encore possible d'en faire l'inventaire. Il nous a manqué un grand musée vraiment "marin" comme Mystic, et un médiateur comme John Gardner, qui popularise les savoir-faire traditionnels avant qu'ils ne se perdent. L'histoire américaine nous invite donc à la modestie et nous montre les carences qu'il nous faut combler par un travail accru - tout est à mener de front - et un supplément d'imagination. Mais, à vaincre sans péril on triomphe sans gloire les difficultés ne sont-elles pas aussi de nature à nous stimuler ?