Certaines idées reçues ont la vie dure. La « voile, sport de classe », par exemple ! Pour bien des gens, ce loisir d'origine aristocratique, stylé à l'anglaise, n'a été révélé au public qu'à l'avènement de la plaisance de consommation moderne, avec son cortège de marinas et de « courses pub ». Cette vision des origines de la voile, qui émane de milieux coupés de la vie populaire du littoral, ne reflète qu'une partie de la réalité. A côté des grands yachts de luxe, des centaines d'embarcations et de propriétaires plus modestes naviguent, pêchent, régatent sur toutes les côtes françaises depuis plus d'un siècle. Issus des bateaux de travail régionaux, construits économiquement dans les mêmes chantiers, ils évoluent de manière autonome au sein de traditions locales très différenciées. Après avoir évoqué les bettes de course marseillaises et les sloups morbihannais, le Chasse-Marée consacre aujourd'hui une étude à l'histoire des canots du Havre. Plus tard, nous irons à Carantec, à Arcachon, à Saint-Malo, à La Ciotat, en Gironde... En faisant ressurgir du passé ces traditions locales moins oubliées qu'on ne pourrait le croire, nous avons un espoir, et une volonté : attirer l'attention sur l'activité des derniers chantiers locaux construisant à l'unité ; permettre la renaissance d'autres formes de plaisance, minoritaires sans doute — tout le monde n'a pas le temps ni le goût de s'occuper d'un petit bateau en bois -- mais dont la poésie, la diversité et la simplicité profiteront à tous.