La Fillonnerie, chaland de 14,90 mètres de long et 3,90 mètres au maître-bau a bénéficié de travaux à l'été 2025.

Le 16 octobre dernier, Paris accueillait un curieux équipage. La Fillonnerie, réplique d’un chaland de Loire du XIXe siècle construite en 2007 par l’association Les Charpentiers d’Ieau, a traversé la capitale via la Seine. À son bord, une troupe costumée (dont deux en blaireau et en aigrette) jouait de la harpe et de la batterie.
Partie d’Orléans un mois auparavant, à la clôture du festival de Loire, l’équipe du projet BatoLabo s’est engagée dans un long périple à travers l’Europe jusqu’au delta du Danube. L’escale parisienne n’était qu’un avant-goût de leur programme, avec un colloque à l’université de Nanterre organisé autour des enjeux de pollution liés aux fleuves, du patrimoine culturel immatériel de la navigation sur la Loire et des questions de droits de la nature.

Les travaux ont été faits sur : le puits de moteur, des bordages, et des arronçoirs, pièces de bois dont le bord inférieur est taillé en forme de crémaillère, qui sont placées sur les côtés, à l’avant et l’arrière du bateau.

Ces thématiques concernent de près l’aspiration de BatoLabo : « Nous souhaitons, au cours de notre descente du Danube, porter un projet de loi européenne de reconnaissance de personnalités juridiques pour des entités naturelles, précise Basile Maytraud, diplômé en anthropologie de l’environnement au Muséum national d’Histoire naturelle. Ce projet est en cours de rédaction par plusieurs acteurs, dont les juristes de Notre Affaire à tous, dans la lignée d’initiatives locales telles que le Parlement de Loire. »

Destination : La Roumanie

Afin de porter ce texte devant le Parlement européen, il faudra recueillir 1 million de signatures issues d’au moins sept pays membres de l’Union. Le voyage de La Fillonnerie devrait aider à récolter ces signatures parmi les populations riveraines du Danube. « Grâce aux artistes en résidence et ceux au sein de l’équipage, comme Chloé Löwy-Girardeau, ce texte de loi sera traduit artistiquement. »
Le projet est également ethnographique puisque Basile Maytraud souhaite étudier les liens des communautés fluviales à leur environnement. Il est aussi scientifique : à la demande d’un chercheur de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe) de Thonon-les-Bains, l’équipage a embarqué des instruments de prélèvements d’ADN environnemental. Cette partie sera chapeautée par Samuel Botreau, batelier et coordinateur général, et Romane Picard, batelière et coordinatrice navigation. Les échantillons serviront à étudier les effets des crues sur les phytoplanctons.

Après le chantier, le chaland a pu rejoindre Paris.

Le programme est vaste et riche, et La Fillonnerie, tout juste sortie de chantier, traversera pour la première fois les frontières françaises, au grand bonheur de ses fabricants et propriétaires qui rêvaient de voir leur chaland naviguer sur les fleuves européens. Après un hivernage à Strasbourg, ville rejointe via le canal du Rhône au Rhin, le chaland descendra, à la voile et au moteur, à partir d’avril, sur le grand fleuve frontière pour rallier le Main, puis le Danube via le canal Rhin-Main-Danube. Il est attendu en Roumanie à la fin de l’été. Les escales le long de ce périple de 4 000 kilomètres seront organisées en lien avec les lieux culturels et les acteurs locaux de la marine en bois. M. L.-C.

Publié dans Le Chasse-Marée 348 – Décembre 2025-Janvier 2026