Quasi mythique, l’épave du navire de l’expédition antarctique d’Ernest Shackleton, perdue dans les glaces en 1915, a été retrouvée.

Les lettres du nom Endurance, fixées sur la poupe au-dessus d’une étoile en bas-relief l’identifient formellement : le navire découvert par 3 008 mètres de fond par l’un des robots sous-marins de l’expédition Endurance22, dont nous vous annoncions le départ dans notre précédent numéro, est bien celui de l’explorateur Ernest Shackleton (CM 174), perdu en octobre 1915 après avoir dérivé pendant un hiver, emprisonné dans la banquise antarctique.

L’histoire du navire est bien connue par le récit que Shackleton fit de cette calamiteuse expédition, devenu un livre mythique, et grâce au reportage saisissant réalisé par le photographe du voyage, Frank Hurley. La position du navire avait été régulièrement relevée par le capitaine Frank Worsley au cours de sa dérive.

Pourtant les recherches menées pour retrouver l’Endurance devaient s’avérer extrêmement compliquées, dans cette zone recouverte par la glace une partie de l’année, et régulièrement traversée par des tempêtes. Dirigée par l’explorateur polaire britannique John Shears et l’archéologue naval malouin Mensun Bound, une équipe de cinquante personnes a embarqué en février 2022 du Cap à bord du brise-glace sud-africain Agulhas II, équipé de deux robots sous-marins autonomes Sabertooth, capables d’explorer, de filmer et de cartographier le plancher océanique sur de grandes distances, jusqu’à 4 000 mètres de profondeur.

Pendant deux semaines, les robots ont ainsi couvert une grande surface de la zone de recherche, jusqu’à l’invention de l’épave le 5 mars dernier. Ne cachant pas leur émotion, les scientifiques assurent que les restes du navire sont extraordinairement conservés : à voir les images transmises par les robots plongeurs, il semble que le naufrage date d’hier… Posé sur sa quille, le navire a certes subi quelques dommages au niveau de l’étrave, sans doute lors de son impact sur le fond, mais pour le reste, son état reste fidèle aux images prises avant qu’il ne sombre. L’épave, monument protégé par le Traité international sur l’Antarctique, doit rester intouchée, et aucun objet ne pourra y être prélevé.

 

© Falklands Maritime Heritage Trust and National Geographic

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