A Hendaye, Socoa, Biarritz et jusqu’à Bilbao, la pêche côtière basque utilise des embarcations dont le type se retrouve à échelle réduite dans l’actuel batteliku : étrave étroite et fine, arrière rond bien posé sur ses fesses, tirant d’eau modeste, déplacement léger. Seules les deux plus importantes d’entre elles embarquent des équipages structurés.

Dessin Traînière et chaloupe basques.
Traînière et chaloupe basques. © J. P. Guillou

La traînière (traiñera, treiñerua), de 9 à 12 mètres pour un bau de 3 mètres, est armée par 7 à 11 hommes, patron compris. Légère et maniable, elle a joué autrefois un rôle de premier plan dans la pêche à la baleine. Au début du xxe siècle, elle est utilisée pour la pêche à la sardine, à l’anchois, au chinchard à la senne tournante, ainsi qu’au germon à la ligne de traîne tangonnée. Légère, non pontée, elle est rigidifiée par 9 à 11 bancs.

La chaloupe (txalupa), de 11 à 14 mètres (rarement 15), pour un bau de 4 mètres, est nettement plus lourde. Non pontée jusqu’à la galerne du 11 août 1912, qui fait 141 morts en Biscaye, et même après, c’est réellement le zabaleko ontzia, le bateau du large, que des patrons, rendus téméraires par le cidre local, engagent parfois jusqu’en mer d’Irlande, l’équipage ayant pour abri le dessous des bancs et la drome !

Plus communément, les 13 hommes du bord mouillent des lignes de chanvre tenues à la main, dont l’avançon est dédoublé par un balancier (kublia). Ils prennent de la raie pocheteau, du mérou des Basques, des anges de mer, alors abondants. Des palangres traînées ramènent des daurades roses et grises. L’été, les chaloupes pêchent le thon aux tangons. Les leurres sont des poissons en tissu ou des peita, des feuilles de maïs séchées et bariolées de teintes vives.

Ces deux embarcations ont une double particularité. Elles vont souvent à l’aviron et leur gréement mobile (grand voile et misaine, au tiers) demande beaucoup d’efforts pour l’établir et le réduire. Seuls de longs bords justifient d’envoyer la toile. A l’avant, un court mât de misaine se dresse presque verticalement ; il repose sur la quille dans une emplanture de section carrée. Le grand mât possède une quête arrière souvent très importante et peut être incliné grâce à un étambrai spécial. On peut aussi accroître la quête sur l’arrière pour mieux remonter au vent. Des fargues rehaussent le franc-bord, on abaisse une dérive latérale sous le vent, un gouvernail profond est enclenché dans les ferrures d’étambot. Pour le reste, avec ces équipages infatigables surnommés “les fous d’aviron”, les muscles font seuls office de moteur : traînières et chaloupes pêchent et font route à la force des bras, le patron gouvernant debout avec txopako arrauna, un fort aviron de queue.

Traînière devant Biarritz. © coll. Chasse-Marée

La deuxième particularité réside dans le mode de construction, qui commence par l’extérieur. La quille, l’étambot, l’étrave sont posés sur des chantiers horizontaux. Puis des gabarits donnent un simulacre d’ossature, que l’on borde à tapisser avec de l’acajou ou du pitchpin ou à virure passée, à raison d’un bordé en chêne sur deux, les planches intermédiaires étant forcées à la toute fin de la construction. Lorsque l’enveloppe est constituée, on étuve, on ploie et l’on dispose en force les membres d’acacia (kostillak) avant refroidissement. On rivète l’ensemble et l’on démonte les gabarits. L’ajustement des serres internes et des bancs parachève la cohésion d’une embarcation qui n’en demeure pas moins étonnamment souple, malgré la présence d’une forte préceinte extérieure où s’implantent les tolets.

Les dernières chaloupes ont pris la mer jusque vers 1925.