Sur les côtes du Calvados, jusque dans les années 1960, on trouve un petit bateau d’origine très ancienne, bien adapté aux plages de la région, construit sans quille, à larges clins et à extrémités symétriques : c’est le picoteux, qui doit son nom à l’une des pêches qu’il pratique, celle des poissons plats, picot ou flondre. Il est très répandu sur trois zones.

Picoteux bas-normand. © J. P. Guillou

Des bords de l’Orne à Courseulles-sur-Mer, le picoteux est construit jusqu’en 1954, et présente une assez grande diversité : à Dives, il est plus fin pour la pêche à la senne (poissons plats) ; à Courseulles, il est plus rond pour les cordes. Construit en orme, avec des membrures en frêne ou acacia, il possède 6 avirons ; la direction est assurée par un aviron de queue. Parfois gréé d’une voile au tiers, le picoteux, qui utilise surtout les avirons, n’est pas un bon voilier, il ne marche bien qu’au vent arrière ; la voile au tiers hissée sur un mât central est amurée en abord, et il faut l’amener à chaque virement. Il ne pêche pas au-delà de 5 à 7 milles du rivage. Il est utilisé pour une grande variété de pêches : à la senne (de Ouistreham à Dives pour les poissons plats), aux petits folles à bâton à Saint-Aubin-sur-Mer, aux tramails sédentaires de Courseulles à Arromanches, aux lignes courantes et aux claies à crustacés (homards, étrilles, crabes). Certains picoteux, gréés à livarde, sont utilisés pour le transport du sable sur l’Orne, de Ouistreham à Caen.

Construit jusqu’au lendemain de la Seconde Guerre, le picoteux d’Isigny, long de 6 mètres, possède deux bancs pour la nage en couple. Il est principalement utilisé pour la pêche des moules dans la baie des Veys, mais aussi des coques, anguilles, bars, maquereaux et poissons plats. En 1915, les 29 picoteux armés à Isigny ramènent 176 tonnes de moules.

Le picoteux de Grandcamp est le plus grand (8 mètres) et sert d’annexe pour rejoindre le mouillage permanent des grandes barques. Il ne sera plus construit après 1923, date de la construction du port grand-copais.