Le ketch harenguier, successeur du lougre, appelé “dundée” (prononcer à la française) ou “péqueux”, est utilisé à Fécamp, Saint-Valery-en-Caux et Boulogne. Il s’adonne essentiellement à la pêche du hareng aux filets dérivants, de début août à décembre, et à la pêche du maquereau, toujours aux filets dérivants, de mars à juillet.

Dessin dundée harenguier de Fécamp
Dundée harenguier de Fécamp. © J. P. Guillou

Long d’une trentaine de mètres, large d’environ 7 mètres, avec plus de 3,60 mètres de creux, pour une jauge dépassant les 100 tonneaux, le dundée porte une voilure complète, d’environ 320 m2. Celle-ci se compose d’un foc envoyé sur le long bout-dehors, d’une trinquette hissée sur l’étai du mât de misaine. Un hunier de forme trapézoïdale complète le gréement. L’artimon est la voile du mât arrière ; celle-ci, contrairement à la misaine, est saisie sur une longue bôme. Par beau temps, on envoie un hunier nommé pantalon au-dessus de la voile d’artimon, ainsi qu’une voile triangulaire appelée martincote, entre les deux mâts. Le mât de misaine est rabattable et reste couché lors des opérations de pêche.

La pêche principale, la plus rémunératrice, est celle du hareng salé, de fin juillet à début août ; elle est suivie par celle du hareng frais, de novembre à décembre. La campagne du maquereau, au printemps, est bien moins avantageuse.

La pêche du hareng se pratique aux filets dérivants. Ce sont 300 filets, appelés sennes, de 18 mètres de long pour 9 mètres de chute, qui sont attachés bout à bout. L’ensemble constitue une nappe d’environ 5,4 kilomètres pour une surface de 48 600 m2 de filets. Ces filets restent amarrés au bateau par une forte aussière, le halin. A la surface de l’eau, des tonneaux – un par senne – de 33 litres, appelés “quarts à poches”, maintiennent la tessure en flottaison. De ces quarts à poches, un cordage de quelques brasses de long, la martingale, va s’amarrer sur le halin. En faisant varier la longueur de la martingale, les pêcheurs règlent la profondeur des filets.

Le Jean Charcot, patron Jean-François Bénard, part en pêche tout dessus en 1908 © Ch. Héry

La mise à l’eau de la tessure se fait par tribord arrière, en fin de journée, et dure par beau temps environ trois heures. Le halin est ensuite capelé sur un fileux à l’avant, et le bateau part en dérive sur son train de pêche. Pour éviter un trop fort fardage lors de la dérive, le mât de misaine est couché sur une miche à l’aide de la forte caliorne capelée sur l’étrave et l’artimon est hissé pour maintenir le bateau bout au vent. Le lendemain vers 2 ou 3 heures du matin, le patron crie au capot du poste d’équipage : “Greille on va virer.” Le halin est tourné autour du cabestan à vapeur et le filet remonte à bord par l’avant tribord du navire. Un homme détache les sennes et les quarts à poches du halin et le filet est secoué sur le pont dans des parcs appelés gattes. Le poisson, qui est pris uniquement par les ouïes, se décroche alors facilement. Cette opération, harassante, dure en moyenne six heures, et parfois bien plus.

Pour les pêches lointaines de la mer du Nord, le hareng est salé et mis en barils. Ces barils de bois contiennent environ 800 harengs, soit environ 100 kg. Pour la pêche côtière en Manche, le hareng est enfallé frais dans la cale ou reste sur le pont, lorsque le port est à quelques heures de route. En 1910, les 29 dundées attachés au port de Fécamp ont débarqué 74 000 tonnes de hareng, destinées essentiellement aux saurisseries de la ville.