Loguivy-de-la-Mer, en Ploubazlanec, est situé à l’embouchure de la rivière du Trieux, face à l’archipel bréhatin. Au bout du sillon, se rejoignent le Trieux et les deux chenaux de sortie vers le large : le grand chenal à l’Ouest de l’archipel bréhatin et le Ferlas (ou Ferlez) au sud de l’île. Une multitude d’îlots s’étend parmi les courants puissants.

Langoustier de Loguivy. © J. P. Guillou

Pour pêcher dans les cailloux, Loguiviens et Bréhatins sont les premiers à adopter le casier. Sa fabrication leur aurait été expliquée par un M. Broke de Guernesey, au XVIIIe siècle. C’est une caisse cylindrique faite de châtaignier et d’osier rouge, avec une ou deux entrées pour les crustacés et une porte de visite pour boëtter et ôter la prise. Ils sont groupés par deux sur une filière, liée à un orin, terminé par un ou deux flotteurs. Les Loguiviens vont expérimenter ce mode de pêche dans leurs eaux, puis le généraliser peu à peu sur la côte nord.

Dès le XIXe siècle, ces marins entreprenants partent pour des campagnes d’avril à novembre en mer d’Iroise sur des petits flambarts non pontés, appelés lougres, et s’établissent au Conquet, puis à Sein, pour pêcher le homard. La plupart des marins sont accompagnés de leurs familles qui s’établissent sur l’île pour la durée de la pêche. Larges et trapus, ces petits canots sont des bateaux marins, bien adaptés aux pêches pratiquées dans ces parages difficiles. Le large taillevent bômé à amure fixe, équilibré par un foc, la misaine à amure reculée facilitent les -évolutions autour des casiers.

Vers 1880, le gréement de bocq, encore plus maniable, apparaît sur des bateaux creux, puis demi-pontés, d’environ 8 mètres. Puis, dans les dernières années du siècle, de forts sloups pontés à cul-de-poule font leur apparition et s’orientent vers la langouste, plus rentable. Dès 1903, ils arment pour les côtes de la Cornouailles britannique. Partant de Loguivy deux jours après les grandes marées, ils pêchent pendant 7 à 8 jours, puis se rendent dans les ports de vente français, avant de regagner les lieux de pêche et ainsi de suite. Si la langouste foisonne à cette époque, les moyens de recherche sont très limités : les concentrations de langoustes s’apprécient à l’œil, aux taches qu’elles forment sur des fonds plutôt sableux. Les pêcheurs racontent qu’une fois qu’ils les avaient repérées, ils en trouvaient dans le casier, autour du casier et sur l’orin qu’ils halaient doucement pour les décrocher.

Langoustiers port Loguivy
Les sloup langoustiers du port de Loguivy un jour de fête. © coll. Chasse-Marée

L’essentiel des langoustiers provient du port de Loguivy, avec quelques unités de Pors-Even et Port-Lazo. En 1906, les fêtes de Loguivy réunissent 40 bateaux, dont 28 armés à la pêche et 5 au transport des crustacés, avec 120 hommes d’équipage. Les régates, chaque été, sont acharnées et les formes et gréements sont discutés et peaufinés.

Les chantiers lancent régulièrement et jusqu’à la Première guerre, des sloups de 12 à 25 tonneaux de jauge, construits légers à l’habitude de Paimpol. Les coques sont à étrave droite avec un brion très marqué au tournant du XXe siècle. Il s’arrondit ensuite pour donner un bateau plus évolutif et moins ardent. L’arrière est prolongé d’une voûte plutôt longue. Le gréement adopté est celui de sloup à corne. Les grands mâts portent grand voile, flèche, foc et trinquette et l’importance de la surface de la voilure est l’une des caractéristiques -essentielles des langoustiers.

Après la Première Guerre, l’activité reprendra, mais avec moins de bateaux. Les Loguiviens vont chercher la langouste sur le plateau de Rochebonne, au fond du golfe de Gascogne, au Portugal. Après la Seconde Guerre, ils partent en Méditerranée jusqu’en Grèce.