Par Philippe Urvois – Le choix d’une remorque peut apparaître assez compliqué au regard du grand nombre de modèles disponibles sur le marché. Voici donc quelques repères pour s’y retrouver.

L’article publié dans la revue Le Chasse-Marée bénéficie d’une iconographie enrichie.

Pour orienter son choix, le particulier doit avant tout, connaître le poids de son bateau, auquel il convient d’ajouter celui du matériel embarqué (jeu de voiles, espar, moteur…). Majorée de 20 à 30 % par sécurité, cette somme correspond à la charge utile de la remorque, c’est-à-dire au poids maximum qu’elle peut transporter.

« Ce paramètre détermine en grande partie les caractéristiques de la remorque, explique Gaëtan Podvin, technico-commercial au sein de la société Applications industrielles et nautiques, qui commercialise les marques Rocca, Pam et Nautilus. La charge utile va par exemple avoir une influence sur la conception du châssis, sur la section des longerons qui le constituent, sur le nombre d’essieux – nous les doublons au-delà de 1 300 kg –, ou encore sur le choix des roulements de roues, des pneus ou des amortisseurs. On pourrait résumer cela par une évidence : plus la charge utile est forte et plus la remorque est solide et imposante. Le client n’a pas véritablement de choix à faire : nous l’orientons vers un produit adapté à la charge transportée, au sein d’une gamme. »

Comment savoir si les options des constructeurs sont pertinentes et s’ils emploient des composants de bonne facture ? « Le prix donne déjà une idée de la qualité du produit », indique Gaëtan Podvin.

UNE FABRICATION ENCADRÉE

Mais il rappelle aussi que la fabrication des remorques est étroitement contrôlée par l’Administration – aujourd’hui la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), qui a remplacé le service des Mines –, parce que ces engins sont appelés à circuler sur le domaine public. Ils sont obligatoirement homologués dès que leur poids total autorisé en charge (PTAC) dépasse 500 kg et la législation impose certains choix techniques en fonction de leurs capacités de charge. Si son PTAC est supérieur à 750 kg, une remorque doit, par exemple, être dotée de son propre système de freinage : il se déclenche automatiquement lorsque le véhicule tracté vient pousser sur l’attelage du tracteur en train de ralentir (ce « frein à inertie » ne doit pas être confondu avec le frein de stationnement qui équipe la plupart des remorques et est assimilable à un frein à main de voiture).

Remorque à timon cassant. La mise à l’eau est contrôlée grâce au treuil, qui ne doit jamais s’emballer.

La forme de la carène entre également en ligne de compte lorsqu’on choisit sa remorque. La disposition des patins – ou des rouleaux s’il s’agit d’une remorque servant à la fois au transport et à la mise à l’eau – doit permettre de répartir les efforts sur l’ensemble de la structure porteuse tout en plaçant la charge le plus bas possible, afin d’abaisser le centre de gravité du convoi. Leur place varie donc en fonction du type de carène. Sur une remorque prévue pour une coque rigide, l’étrave du bateau est bloquée dans un patin en forme de V situé à l’avant de la remorque, tandis que la quille et différents points des œuvres vives sont guidés ou maintenus par des rouleaux permettant de faire glisser le bateau sur son support. Ces rouleaux peuvent être simples, doubles, triples- ou quadruples et orientables. Leur dimension, leur nombre est fonction du poids et de la longueur de la coque.

Pour simplifier le problème, la plupart des fabricants de remorques travaillent aujourd’hui en relation avec les chantiers navals et proposent des engins spécialement adaptés à leurs nouveautés, lorsqu’elles sont produites en série.

Que faire lorsqu’on possède un bateau ancien ou de formes particulières ? « Nous adaptons un modèle type, répond Gaëtan Podvin. Tout doit pouvoir être réglé sur une remorque, notamment la position verticale et horizontale des galets. Mais il faut souvent discuter avec le propriétaire du bateau – voire avec l’architecte – pour déterminer à quel niveau de la coque il est possible de prendre appui sans risque. Sur un bateau en bois, cela correspond généralement aux varangues ou aux membrures. »

L’arrimage du bateau sur la remorque est toujours renforcé par des sangles qui le tirent vers le bas, à l’avant et à l’arrière. Le châssis comprend donc des points – un organeau ou une patte métallique – pour leur passage. Beaucoup de remorques sont également équipées d’un treuil. Positionné à l’avant, ce dernier doit être en rapport avec le poids du bateau et correctement démultiplié afin de haler facilement la coque sur la remorque. Les constructeurs proposent ici diverses solutions, allant du rustique système à cliquet au modèle électrique, plus cher. Les treuils à sangle sont aujourd’hui privilégiés, au détriment de ceux à câble, ce dernier pouvant rouiller en vieillissant ou se hérisser de « gendarmes » dangereux.

LE TIMON CASSANT FACILITE LA MISE A L’EAU

Parmi les autres choix qu’offrent les constructeurs, on peut également examiner la possibilité d’acheter une remorque « à timon cassant » dont la partie arrière bascule afin de faciliter la mise à l’eau du bateau et, surtout, sa sortie. Ce système, qui peut s’avérer très pratique pour ceux qui naviguent hors des sentiers battus, semble cependant plutôt adapté aux bateaux petits et pas trop fragiles. « Nous n’en proposons pas pour les remorques de plus de 550 kg de charge utile » indique pour sa part Gaëtan Podvin.

Montés sur des axes, ces rouleaux doubles s’adaptent parfaitement à la coque à clins de cet Élorn.

Les fabricants insistent presque tous sur le fait que les remorques ne doivent jamais être immergées et beaucoup conditionnent leur garantie au respect de cette consigne. Ce qui n’est pas toujours évident… Elles sont certes prévues pour résister à l’eau salée. La boulonnerie et les châssis sont galvanisés, ce qui leur assure une durée de vie d’environ dix ans. Les jantes de roues sont aussi mieux protégées que celles des voitures et les roulements utilisés sont normalement étanches. Un rinçage à l’eau douce peut donc limiter les dégâts liés à l’immersion en milieu salin.

En revanche, l’exercice est plus risqué lorsque la remorque dispose d’un système de freinage. Conscients du problème, certains fabricants proposent donc, sur ce type de remorque, des systèmes permettant de laver les moyeux à l’eau douce. Mieux vaut, malgré tout, essayer de s’en tenir à la limite de baignade autorisée et ne tremper que la bande de caoutchouc des pneus… par sécurité et par souci de faire durer le matériel : le prix d’une grosse remorque (PTACde 3,5 t) peut tout de même avoisiner les 9 000 euros.

 

Conseils

• Achat d’occasion
L’achat d’une remorque d’occasion peut-il se révéler intéressant ? « À condition d’avoir quelques notions de base et d’être réactif, répond Gaëtan Podvin. Les bonnes remorques ne restent pas longtemps sur le marché, notamment parce qu’elles intéressent les vendeurs professionnels de bateaux d’occasion. Le fait de proposer en même temps le bateau et sa remorque est un argument de vente qui joue aussi lors des transactions entre particuliers. Mais les acheteurs examinent en général plus attentivement l’embarcation que sa remorque et oublient même, parfois, d’en demander la carte grise [pour les modèles de plus de 500 kg] et de remplir un acte de vente. Ils se retrouvent donc en infraction, sans toujours le savoir. Le pire, ce sont les remorques bricolées maison ou modifiées, qui ne sont pas ou plus homologuées. En cas d’accident, cela peut avoir de lourdes conséquences. »

• Utilisation
«Il est important de régler ou de faire régler la position longitudinale de l’essieu pour que la remorque soit bien équilibrée, explique Marc Ronet, propriétaire d’un Bélouga. Cela conditionne beaucoup son comportement routier. Le poids exercé sur la boule d’attelage doit avoisiner 50 kg. Il est aussi intéressant de consulter les catalogues des fournisseurs pour améliorer sa remorque. J’ai ainsi rajouté des traverses et des rouleaux supplémentaires sur la mienne pour mieux répartir les efforts exercés sur le bateau. J’ai également remplacé tous les axes creux des rouleaux, qui s’écrasaient, par des axes pleins. ».