Saint-Jacut-de-la-Mer est un village de marins bâti sur une presqu’île, dont la flottille pratique depuis des temps reculés la pêche côtière entre le cap Fréhel et l’île de Cézembre (chalut, drague, filet, ligne).

Dessin
Canot jaguen. © J. P. Guillou

Les canots jaguens font la pêche au maquereau de mai à septembre et, plus rarement, la pêche aux casiers et aux cordes en hiver. Ces bateaux non pontés, longs de 4 à 6 mètres, ont une coque râblée, bordée à franc-bord et coaltarée, avec une forte étrave et un tableau arrière très peu incliné ; le lest est constitué de cailloux. Une petite chambre sert à ranger les lignes et les vivres ; deux à trois bancs raidissent l’intérieur.

Le mât de misaine non haubané est emplanté sur un solide brion d’étrave, maintenu par un collier en fer. Le hale-dehors du rocambeau joue le rôle de sous-barbe en revenant à l’étrave par une “joue de vache”. Typique du canot jaguen, le mât de tapecul est maintenu extérieurement sur le tableau par deux ferrures décalées. La queue-de-malet traverse le tableau et se fixe au banc arrière.

La grand voile au tiers s’amure à un croc boulonné en avant du mât. Le palan d’écoute simple, retenu par une barre d’écoute courant d’un bord à l’autre par-dessus la barre, se tourne sur un taquet du tableau arrière. Sur les unités plus petites, l’écoute simple vient se tourner directement sur une “gueule de raie” traversée par un tolet. Le foc est gréé de manière classique. La trinquette, en revanche, s’amure à mi-bout-dehors et la drisse passe par la dernière cosse de ris de la ralingue de misaine. Le tapecul se hisse comme la misaine, mais en opposition avec celle-ci. Le flèche s’établit à la verticale dans le prolongement du mât, le nœud de bois de la drisse venant s’encastrer dans le dernier clan du mât. Cette voile n’est envoyée que pour se rendre sur les lieux de pêche par vent favorable ou lors des régates.

canot-jaguen sous voile
La Margate, de 1939 restauré en 1988. © M. Thersiquel

La pêche au maquereau se pratique à l’affare, bouillie à base de crabes verts, coques, pieds de couteaux ou minuscules crevettes, le chevrin. Mâtures abattues, les bateaux mouillent en ligne sur des ancres de pierre (pigasses). Le bouetteur jette son affare dans le courant, au cul du bateau, puis file ses lignes qui ne sont pas plombées, car le poisson remonte seul. Le produit de la pêche est vendu par les femmes ou salé dans des tonneaux. Au XIXe siècle, les jaguens conservaient leur poisson au frais en l’enveloppant d’orties et de fougères, dans des mannes tressées en chèvrefeuille.