La plus ancienne œuvre qui nous reste de Willem van de Velde dit l’Ancien (1611-1693) date de 1638, peu après la naissance de ses fils Willem et Adriaen, suivie du déménagement familial à Amsterdam où cet artiste, fils du patron d’une cogue de Leyde, trouvera une clientèle à la mesure de ses ambitions. C’est une période faste, les marines sont alors en vogue, et une vingtaine d’ateliers d’importance s’y consacrent en ville. Willem van de Velde se distingue de ses concurrents en se spécialisant dans les grands dessins à la plume, avec un raffinement de détails extrême. Son travail rencontre un vif succès, auprès des familles de marins, d’armateurs, de commerçants, jusqu’à l’amiral Cornelis Tromp, et même Côme et Léopold de Médicis, qui acquièrent auprès de lui d’importantes séries de dessins. Ses deux rejetons apprendront à ses côtés, Willem le Jeune (1633-1707) se perfectionnant ensuite dans l’art de la peinture à l’huile, dans les années 1650, auprès de Simon de Vlieger, tandis qu’Adriaen délaissera la chose maritime pour se consacrer aux paysages.

Willem l’Ancien embarque, au moins à six reprises, comme dessinateur de la flotte à bord d’une galiote de l’Amirauté d’Amsterdam, pour dessiner au plus près les grandes batailles de son temps, entre 1652 et 1673. Il croque ces scènes sur de grandes bandes de papier aboutées, auxquelles il adjoint d’autres plus petits formats.

On découvre ces esquisses ainsi que des dessins préparatoires, puis six des grands dessins à la plume, dans une aile qui lui est dévolue au sein de l’exposition que le Scheepvaartmuseum, musée de la Marine d’Amsterdam, consacre à la famille jusqu’au 27 mars. La présentation, qui joue sur les agrandissements spectaculaires des détails, les fait vivre et les met en valeur en attirant l’œil du spectateur vers les points les plus remarquables, y compris l’artiste, montré à l’œuvre au cœur de la scène.

En 1672, année noire de la République, en guerre contre l’Angleterre et la France, le marché de l’art s’effondre aux Pays-Bas. Les Van de Velde, à l’invitation du roi d’Angleterre, rejoignent la cour à Londres et installent leur atelier dans la « maison de la reine » à Greenwich. Une de leurs premières commandes sera celle des cartons de six grandes tapisseries représentant la bataille de Solebay, à laquelle Willem l’Ancien a assisté… du côté batave – deux de ces pièces exceptionnelles sont présentées à l’étage inférieur dans le cadre de l’exposition.

L’atelier des deux Willem rencontrera un franc succès en Angleterre, en particulier les scènes colorées, magnifiquement éclairées de Willem le Jeune. Scènes de vaisseaux dans la tempête, de batailles encore ou – spécialité maison – de voiliers encalminés  font fureur jusque dans les cercles les plus huppés. Deux grandes salles leur sont dédiées dans l’exposition.

Cornelis, le fils de Willem le Jeune, à sa mort, reprendra l’atelier mais il n’aura pas de successeur… Une nouvelle école anglaise est sur le point d’émerger. L’atelier des Van de Velde aura produit au moins deux mille cinq cents dessins et quelque huit cents peintures en trois quarts de siècle. Ici sont réunies des œuvres des collections des musées de la Marine d’Amsterdam et de Greenwich, mais aussi de celles du Rijksmuseum, voisin, du Mauritshuis à La Haye, ainsi que des familles royales britannique et néerlandaise.