Lundi 16 mars, cale de Morgat, dans le Finistère : des enfants courent, une quinzaine d’amis et de marins s’affairent autour de Julien Gratiot, du chantier Organic Boats, et de son Palatto (CM 305). La pirogue à balanciers sort juste de chantier. Une fois les deux flotteurs liés à la coque centrale au bordé en toile de lin, le mât est dressé, ses haubans en lin tournés sur des taquets de bambou vert. Julien a terminé de coudre la voile dans la nuit.

Odeur de cire, de bois et d’huile de lin. La pirogue est portée jusqu’à la mer. Elle flotte ! Et pas une goutte d’eau à bord. La pagaie à l’éclat jaune rappelle les inspirations lointaines de ce projet local et écologiquement vertueux – les matériaux employés sont naturels, si possible locaux et exempts de produits chimiques. Inspiré des sandeq indonésiens, le Palatto arbore une voile au modèle emprunté à une île des Samoa, d’après une étude d’Anne Di Piazza, du Centre de recherche et de documentation sur l’Océanie. C’est une des plus performantes qui soient, et la pirogue file. « Elle va vite et réagit au quart de tour. J’ai l’impression de faire du dériveur ! », s’étonne le charpentier. Il remonte bien au vent et vire. Quand le bateau ralentit, la pagaie aide à retrouver de la vitesse.

« Ce modèle est un prototype qui me permet de tester le Palatto “grandeur nature”. Il s’agit de valider les formes, la voile et la formule d’enduit de la toile. Je vais maintenant ajuster le gréement, revoir la fixation des balanciers pour gagner du temps au montage et chercher une essence de bois moins lourde pour les flotteurs. À l’automne, je prévois de lancer un Palatto abouti que je pourrai faire essayer et montrer dans les rassemblements maritimes, conclut l’ancien scientifique, qui s’apprête à faire appel au financement participatif pour la suite du projet. Avec ce modèle, Julien espère séduire les amateurs cherchant une alternative à la voile légère industrielle et aux composites. Sandrine Pierrefeu