Le ventre luisant d’un currach descend vivement vers la mer… Pourtant non, nous ne sommes pas aux îles d’Aran, mais en ville, à Cork, sur la côte Sud de l’Irlande. Les quatre paires de jambes qui portent l’esquif vers les eaux pour son baptême appartiennent bien à ses constructeurs, mais ce ne sont pas des pêcheurs ou des charpentiers du Donegal. Ces demandeurs d’asile venus d’Algérie, de Russie et d’Afrique du Sud, sont venus chaque semaine, de juillet à octobre, travailler bénévolement au chantier communautaire Meitheal Mara, sous la direction de son chef d’atelier Séamus O’Brien. Bad Chorcai est un currach typique de Dunfanagy, une des spécialités de ce chantier. « D’habitude, ce sont les gens du coin qui viennent pour construire un currach ; cette fois c’est nous qui sommes allés inviter les participants dans leur foyer. Ils se sont complètement enthousiasmés pour le projet. » Ces néophytes ont réalisé toutes les étapes de la construction, du ployage des tiges de coudrier jusqu’à l’application du goudron sur la toile… À la mise à l’eau, le maire de Cork, Mick Finn, a salué « le travail remarquable de Meitheal Mara, mélangeant un savoir-faire bien irlandais avec les nouvelles communautés dans cette ville de Cork qui évolue vers une diversité toujours plus grande. » Ce petit bateau de 4,57 mètres illustre l’usage de la construction nautique à des fins sociales, à l’instar des projets de l’école Ilen à Limerick (CM 301). Dans le même esprit, en currach, en yole 1796, ou à bord de ses pirogues-dragons asiatiques, le centre Meitheal Mara se propose ensuite de faire découvrir la navigation à tous.