Quand on entend dire que les tempêtes et les cyclones augmentent avec le réchauffement global de la planète, difficile de croire qu’à l’inverse, sous l’eau, les choses se stabilisent. C’est pourtant ce qu’a montré une étude menée par des chercheurs du CNRS, de l’IFREMER, de Sorbonne Universités, de l’université de Tasmanie, du Centre national d’océanographie de Southampton et de l’université de Pittsburgh, publiée le 24 mars dans la revue scientifique Nature.

Pour rappel, l’océan se divise en deux grandes strates de densités différentes. La couche supérieure, sur quelques centaines de mètres d’épaisseur, se compose d’eaux en mouvement, du fait des courants et du vent. Au-delà, les abysses, sont globalement plus froids, donc plus denses, avec peu de mélanges. Entre ces deux couches, il existe une zone « tampon », dite pycnocline, caractérisée par de fortes variations de densité, lieu des échanges entre la surface et l’océan profond.

Les chercheurs ont montré qu’entre 1970 et 2018, la différence de densité entre les deux couches avait augmenté à un rythme six fois supérieur aux estimations. En cause, la fonte des glaciers et la hausse des précipitations, qui réduisent la densité de la couche supérieure des océans. Une telle évolution a pour conséquence de diminuer les échanges entre les profondeurs et la surface, d’où cette notion de « stabilisation » : les eaux des deux zones se mélangeraient moins. Or, ces échanges sont cruciaux pour la régulation globale du climat par les océans, la chaleur accumulée en surface étant absorbée dans les profondeurs. Ce mécanisme joue aussi un rôle pour l’écosystème marin : les phytoplanctons se nourrissent en effet des nutriments apportés par les eaux des abysses remontant vers la surface. Les chercheurs ont également mis en évidence une autre évolution, moins attendue. Selon leurs observations, la couche supérieure se serait épaissie depuis 1970, principalement en raison de l’augmentation de la puissance des vents, elle aussi entraînée par le changement climatique. Cela pourrait, ajoutent les scientifiques, diminuer l’apport en lumière de cette zone, mettant en danger certains organismes.