Lorsque Josié Beñat, marin-pêcheur comme ses parents et ses aïeux, reprend le Kasko-Gori à la mort de son père, en 2002, et plus encore quand il entreprend de le restaurer, il s’étonne de ce que tout le monde autour de lui s’acharne à le décourager. « On me disait partout que les bateaux en bois c’était de la folie, qu’ils n’avaient que des défauts… »

Il persiste pourtant, et histoire de se sentir moins seul il se lance dans un inventaire de ceux qui, comme lui, arment sur la côte basque de ces canots de bois, pour la plupart des bateaux de 5 à 8 mètres de long que les pêcheurs emploient pendant leur retraite, histoire de continuer le métier tant que faire se peut. Il propose à ceux dont il trouve les coordonnées de se retrouver, le temps d’une « photo de famille », tous à l’entrée du port de Saint-Jean-de-Luz. Il faut croire que chacun, dans son coin, se réjouit à l’idée de ce premier rassemblement informel car personne ou presque ne manque à l’appel.

Le rendez-vous, le 20 août 2006, est un succès. Au point que lorsque tout le monde s’amarre, à couple, des passants se figurent qu’une manifestation bloque l’accès au port ! Dans les joyeux échanges entre équipages de cette journée mémorable, l’ébauche d’un projet associatif se dessine. Il prend corps en 2010, quand Josié Beñat, Jacques Suzanne et Greg Lee, un Américain du Pays Basque qui a saisi lui aussi l’intérêt de ces bateaux, fondent Egurrezkoa – « en bois », pour les non-bascophones.

Cette association rassemble aujourd’hui une cinquantaine de membres, dont les propriétaires d’une vingtaine de bateaux tout au long de la côte basque au Nord d’Hendaye. Egurrezkoa est un lieu de retrouvailles et d’échanges, de discussion autour des savoir-faire et des questions que soulève la vie des bateaux en bois, de la peinture à la mécanique. L’association est même propriétaire d’un canot de 9 mètres baptisé Dizi-Eder – « Elle est pas belle, la vie ? » –, ex-Chrysalis, en attente de restauration chez Albaola, à Pasaia, de l’autre côté de la frontière. Si José Beñat a cédé le Kasko-Gori – « tête-rouge », du surnom de son rouquin de père – et la présidence de l’association, celle-ci est à présent assurée par trois autres membres.

Il en reste d’ailleurs le président d’honneur, se réjouissant de l’arrivée de la relève, avec des propriétaires plus jeunes qui augurent bien de l’avenir des canots en bois dans la région.

<egurrezkoa.com>