Saviez-vous que l’huître est un poisson ? Eh bien c’est ce que nous apprend – entre autres – un petit film de Greenpeace qui, en deux minutes chrono, prétend informer ses followers sur « Comment choisir son poisson quand on est écolo ». Si cela part certainement d’un bon sentiment – « se faire plaisir sans vider les océans », nous dit Alexis, le jeune homme qui nous parle –, et en faisant abstraction du fait qu’il confond mollusques et vertébrés à nageoires, il est assez dérangeant de voir un sujet aussi vaste et complexe en termes d’écologie et d’économie être traité en cent vingt secondes. D’autant qu’à aucun moment ne sont évoqués les pêcheurs, scientifiques ou autres professionnels de la filière qui auraient pourtant appris à Alexis que le casier est davantage dédié aux crustacés… Probablement peut-il se passer de convoquer ceux qui vivent la mer au quotidien, la consommation de noix pouvant remplacer celle du poisson, comme il l’avance.

Mais la phrase la plus importante de ces deux minutes est certainement celle-ci : « Je ne vais pas rentrer dans le détail ». Et c’est bien là que le bât blesse : une réflexion ne peut se construire dans l’approximation et sans un minimum de données, de même qu’il est dangereux de prétendre informer en se contentant d’un survol. Car la problématique est sérieuse, et le monde est bien plus riche et complexe que ne veulent le faire croire de tels objets de communication, malheureusement si courants et consommés en rafale comme des divertissements.

Si je pointe ce sujet, c’est pour avoir vécu récemment une expérience diamétralement opposée à Palamós, en Catalogne du Sud, où le port abrite un très beau musée consacré à la culture maritime locale, et plus précisément à la pêche. La visite débute dans une salle de cinéma par une présentation du site et de son histoire jusqu’à nos jours, avant de se poursuivre dans une vaste halle sur deux niveaux où l’environnement du bateau et les métiers en lien sont abordés autour d’une magnifique catalane gréée. Du patrimoine donc, mais pas seulement, car le musée de Palamós a eu l’intelligence de s’appuyer sur le passé pour contextualiser le présent, qu’il s’agisse des techniques de pêche, de l’état de la ressource et des menaces qui pèsent sur elles, de la vie des marins aussi.

Avec notamment une idée lumineuse. Alors qu’ici, comme dans nombre d’établissements culturels où leurs parents les ont trainés, des enfants courent partout, on les retrouve bientôt assis devant quatre écrans insérés dans un mur, quatre écrans qui présentent heure par heure et en simultanée la vie de quatre marins pratiquant des pêches différentes. Quand celui du trémail est encore dans son lit, celui du chalut est à pied d’œuvre pour la fin d’un trait. Quand celui des nasses rentre au port, celui de la bolinche quitte une soirée entre amis pour prendre la mer. Le pouvoir des écrans, diront certains… Sauf que les enfants sont captivés car on leur donne à voir, dans le détail, une réalité qu’ils méconnaissent. On prend le temps de leur raconter un métier, une vie de marin. Des marins qu’ils croisent d’ailleurs en sortant du musée, sur le quai, à la criée, voire aux terrasses de la Casa del mar ou du Cau de Juan, leurs repères…

La réalité halieutique, comme le reste, ne peut se résumer en deux minutes et trois points. Cessons donc les formules choc et prenons le temps de renouer avec le temps de la découverte, de l’approfondissement, de la réflexion, au plus près de ceux qui savent. Puissent d’ailleurs les pages qui suivent vous enrichir grâce à la rencontre de Jacky Bonnemains, des Mohana, de Maxime Heinisch et de quelques autres…

Retrouvez la vidéo de Greenpeace ici.

Pour découvrir le musée de la Pêche de Palamós, rendez-vous sur <museudelapesca.org>.