par Pierre Nocca – Après avoir vendu son chantier naval à Sète, André Aversa constate que son métier de charpentier est en train de disparaître. Pour en garder la trace, il va réaliser quatorze modèles de bateaux de travail avant de se lancer, pour le plaisir, dans la construction de la goélette America.

L’article publié dans la revue Le Chasse-Marée bénéficie d’une iconographie enrichie.

Le 12 avril, je prends ma retraite », annonce André Aversa. Il aura alors plus de quatre-vingt-dix printemps et c’est la date qu’il s’est fixée pour lâcher définitivement ses outils de charpentier de marine. Il entend bien, cependant, conserver son crayon pour coucher sur le papier les souvenirs d’une carrière bien remplie (CM 162). « J’ai déjà écrit deux livres sur le sujet, mais il va falloir que je vive jusqu’à deux cents ans pour avoir le temps d’en écrire cinq de plus », plaisante-t-il.

En attendant, il prête main-forte à l’association Les Gréements languedociens qui termine la restauration de Jeanne-Élisabeth, la dernière barque catalane de Sète. La quille, l’étrave et l’étambot ont déjà été remplacés et ses jeunes amis – soixante ans à peine – sont à l’œuvre autour du bateau. « Vous n’écoutez pas, alors vous faites n’importe quoi, leur lance sans ambages André Aversa. Mais, bon, vous travaillez et vous avez le mérite de perpétuer la tradition des charpentiers de marine. Alors, on continue… »

André a officiellement débuté sa carrière de charpentier à dix-sept ans, en 1945. Il intègre alors l’équipe du chantier naval familial situé à La Plagette, au bord de l’étang de Thau, qu’il fréquente assidument depuis son plus jeune âge. Il n’avait d’ailleurs que treize ans lorsque son père, Joseph, lui a confié la construction d’un bateau de 3,40 mètres qu’il voulait offrir à un ami. « C’était un canot avec un arrière à tableau. Je l’ai réalisé en travaillant tous les jeudis et pendant mes vacances », se souvient-il.

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À l’aide d’un gabarit, André Aversa reporte sur un plateau de bois le tracé de la quille d’un de ses modèles. © Pierre Nocca

« Un menuisier peut faire un bon charpentier »

Avant de se lancer dans la vie active, il a suivi une formation de menuisier dans une école d’enseignement professionnel de Sète. « Un menuisier peut faire un bon charpentier de marine, mais un charpentier ne pourra pas forcément être menuisier », dit-il aujourd’hui. Cette formation lui a permis d’approfondir sa connaissance du bois – « une matière noble et imprévisible » – et d’acquérir un bagage technique. Durant cet apprentissage, il aurait bien voulu utiliser des machines, mais ses professeurs ne l’entendaient pas de cette oreille : « Aversa, il faut d’abord savoir travailler à la main », s’entend-il répéter à longueur d’année, alors qu’il a accès à toutes sortes d’outils dans le chantier de son père.

« En trois ans d’apprentissage, je n’ai jamais touché une machine ! », s’étonne-t-il encore. Son cap en poche, il souhaite prolonger d’un an sa formation pour mieux appréhender la géométrie et le dessin industriel. « Ce qui m’intéressait, en fait, c’étaient les applications à la construction navale. Mon professeur de dessin m’avait bien prévenu qu’il n’avait pas de compétences particulières pour cela et qu’il pourrait juste valider la présentation et l’exactitude de mon travail, mais j’ai insisté. Il m’a dit d’aller voir le directeur qui a accepté que je fasse une année supplémentaire. C’était gagné ! »

Fort de ce savoir, André Aversa entre donc par la grande porte dans le chantier familial et veut y apporter, d’emblée, une touche de modernité. « En 1945, la seule machine électrique que mon père possédait était une scie à ruban, protégée par un toit de tôle. Je lui ai dit, si je travaille ici, on s’équipe de machines électriques, qui sont plus précises. Sinon, je vais voir ailleurs. Après avoir levé les bras au ciel, il a accepté et a investi dans une raboteuse, une dégauchisseuse, une toupie et quelques outils à main. Et comme on ne pouvait pas laisser tout ça sous la pluie, on a aussi construit un premier hangar de 300 mètres carrés. On pouvait enfin travailler au chaud et les jours de pluie. »

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Lancement du chalutier Notre-Dame d’Afrique pour un armateur algérois au chantier Aversa Frères, à La Plagette, en 1948. André Aversa y fera toute sa carrière – de 1945 à 1983 – et aura l’occasion de construire différentes sortes de bateaux de travail. © coll. André Aversa

De sa formation de menuisier, André Aversa a gardé le goût et la fierté des assemblages précis. Or, dans le chantier de son père, les membrures étaient jusqu’alors découpées à la scie à ruban sur un plan parfaitement orthogonal, la lame étant à 90 degrés par rapport au support de découpe. Les membrures devaient donc être reprises à l’herminette au moment de poser les bordages afin de récupérer les faux équerrages, de plus en plus importants à mesure que l’on progressait vers les extrémités du bateau.

Cet ajustage n’était pas toujours parfait ; les surfaces de contact entre les pièces de bois pouvaient être réduites et, à force d’être reprises, la solidité de certaines membrures pouvait également être altérée.

« Or, on peut connaître avec exactitude le degré de faux équerrage en n’importe quel point de n’importe quel couple sur un plan, pour peu qu’il soit précis, explique André Aversa. Je me suis donc creusé la tête et j’ai mis au point un système de bascule du plateau de découpe. Il fonctionnait grâce à un vérin à vis, l’inclinaison du plateau étant contrôlée par un arc de cercle gradué en degrés. J’ai fait cela avec l’aide d’un mécanicien sétois, dans mon coin. »

À l’époque, l’information ne circulait pas aussi bien que de nos jours et André n’avait guère de contact avec le monde de la charpenterie de marine. Il ignorait donc qu’un tel procédé de découpe existait déjà. « Pendant qu’un ouvrier avançait avec le futur couple sous le ruban de la scie, l’autre actionnait le vérin en continu pour obtenir le bon équerrage tout au long de la coupe, poursuit-il. Une fois assemblées, les jonctions bordage-couple se faisaient parfaitement et sans retouche. Les bateaux étaient ainsi plus costauds et leur construction plus rapide. On en a sorti jusqu’à dix-huit par an à partir de ce moment-là ! »

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Dans l’atelier de sa maison, André Aversa dispose d’une petite scie à ruban avec un plateau inclinable. © Mélanie Joubert

« Je veux qu’on puisse refaire un bateau d’après mes maquettes »

Pour autant, le métier reste ingrat. « En quelques coups de pinceaux, certains artistes peuvent gagner des fortunes. Pour ma part, il fallait travailler longtemps et beaucoup pour gagner ma vie ! Mais quand les clients venaient chercher leur bateau, ils étaient souvent devenus des amis. C’est peut-être ça, ma fortune. Et quand on me dit une bonne parole sur mon métier, je bois et je mange ! »

En près de quarante ans de pratique, André Aversa est devenu une référence et sa carrière a été émaillée de quelques innovations importantes. La plus marquante est certainement la transformation de l’arrière des bateaux quand les pêcheurs sont passés du chalutage latéral en bœuf (à deux) et à la voile, au chalutage en solo avec des bateaux à moteur…

Après avoir vendu son affaire en 1983 et construit toutes sortes de bateaux, André Aversa aurait pu goûter une retraite bien méritée. Mais il s’aperçoit bientôt que les chantiers bois sétois ferment les uns après les autres, supplantés par ceux qui utilisent la fibre de verre. À partir de 1990, il se dit qu’il faut réagir. « Le métier était en perdition, je me devais de laisser une trace », résume-t-il. Pour transmettre son savoir-faire, il va reproduire à échelle réduite ce qu’il faisait autrefois à taille réelle. Avec une exigence : le modèle devra être, en tous points, l’exacte réplique de l’original. « Je veux qu’on puisse un jour refaire un bateau directement à partir de mes maquettes, explique-t-il. Il ne doit manquer aucune pièce et tout doit être parfaitement à l’échelle.

Des bateaux bœufs à la canonnière 

Mes modèles sont au 1/10, 1/15 et 1/20, en essayant à chaque fois d’utiliser la plus grande échelle possible pour être le plus proche de la réalité. Cela évite aussi d’avoir à fabriquer des pièces ou des accessoires tout petits. Je ne sais pas si on peut parler d’un style Aversa, mais chaque modèle est la copie absolument conforme de l’original. »

Pour obtenir ce résultat, il ira même jusqu’à reproduire la scie à ruban avec plateau basculant de son chantier en greffant une scie de modéliste sur un cric de 2 chevaux. Carmen, sa femme, sera chargée de l’actionner pendant qu’il avance dans la découpe en suivant l’angle requis, précédemment tracé sur le bois.

Le souci de perfection est le même pour le bois tord : André ramasse ou se fait amener du buis de la garrigue ou des montagnes environnantes. C’est à partir de cet arbuste au bois dur et tortueux qu’il façonne toutes ses pièces courbes. « Je ne sais pas combien de ces nobles bouts de bois ont été sauvés de la cheminée par André, confirme Carmen. Ces petits arbres sont comme des taureaux qui ont bien combattu. Ils ne méritent pas de disparaître. »

« Quand j’ai un bout de bois en main, je le tourne et je le retourne, poursuit André. Si sa forme me convient, il a encore de beaux jours devant lui. » De ses mains sortiront quatorze modèles allant de la démocratique nacelle au bateau bœuf, dont il ne reste plus aucun exemplaire navigant. Il y a aussi des pointus et des mourres de pouar, bref, toute la flottille de pêche méditerranéenne. Les bateaux sont présentés à différents stades de construction : certains révèlent le travail de charpente, d’autres sont complètement gréés. Chacun peut ainsi voir et comprendre l’art du charpentier de marine.

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« Quand j’ai un bout de bois en main, je le tourne et je le retourne, explique l’ancien charpentier. Si sa forme me convient, il a de beaux jours devant lui. » © Pierre Nocca

Une fois terminée, cette collection unique a été donnée à la ville de Sète qui s’est appuyée sur elle pour constituer le fonds de son musée de la Mer, inauguré le 15 mai 2014. André Aversa aurait pu s’arrêter là. Mais, en 2002, lors d’une visite amicale au Chasse-Marée à Douarnenez, il se voit offrir les plans de la célèbre goélette America. « Je rêvais depuis longtemps de la reproduire », se rappelle-t-il.

De retour à Sète, le plan est déployé sur sa table à dessin lorsqu’il reçoit la visite d’amis. Pour la plupart, ce sont des fils de pêcheurs et le projet d’André ne les séduit pas vraiment. « Tu ferais mieux de t’intéresser au Gabès, qui a servi à la formation de plusieurs générations de mousses entre 1903 et 1952 », lui disent-ils. De fait, cette canonnière de première classe de la Marine nationale faisait partie du décor sétois, au même titre que les bateaux bœufs et les catalanes.

Cédant à cette amicale pression, André Aversa se met donc à la recherche des plans de construction du Gabès qu’il finira par dénicher à Rochefort, où ce navire a été construit en 1882. Suivront plusieurs années de travail pour qu’il soit définitivement libéré de ce devoir de mémoire. Terminé en 2014, le modèle du Gabès est acquis par la ville de Sète et a rejoint depuis la collection du musée de la Mer.

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Ce modèle de bateau bœuf, conçu pour le chalutage, mesure 2 mètres de long et a nécessité plus de 2 000 heures de travail. © Mélanie Joubert

Quitte à faire un yacht, faisons le plus beau 

André n’a pas, pour autant, oublié l’America. « Avec mon père, au chantier, on a toujours fait des bateaux de pêche et je n’ai jamais pu m’exprimer totalement, explique-t-il. Et les goélettes me faisaient rêver depuis longtemps. Alors que je n’avais que seize ans, je me souviens d’avoir vu entrer dans le port de Sète le yacht d’Errol Flynn [Zaca] : c’était une goélette à deux mâts taillée pour la course. Elle était magnifique ! Alors, je me suis dit : quitte à faire un yacht, autant que ce soit le plus beau ! J’ai décidé de me lancer dans la construction de l’America. »

Le charpentier modéliste se met à l’ouvrage au début de l’année 2014. Il a déjà quatre-vingt-six ans, mais il estime qu’il lui faudra sept ans pour venir à bout de ce chantier. « Il aurait fallu moitié moins de temps pour construire ce bateau à taille réelle avec l’équipe dont je disposais sur mon chantier, mais pour cette maquette, j’étais seul ! »

Son premier gros travail consiste à refaire le plan du bateau au 1/16,5 « à cause des mesures américaines en pieds et pouces ». Comme la demi-coque ayant servi à la construction de la goélette en 1851 a été perdue, André ne dispose que d’un plan qui a sans doute été copié et recopié. « Je ne pouvais pas partir de ça pour refaire le bateau. Il fallait que je redessine toutes les courbes pour avoir un plan totalement fiable, poursuit-il. J’ai donc réalisé l’épure [plan transversal indispensable pour toute construction bois] des différentes membrures avant et arrière. » La construction peut alors commencer.

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Le plan de la goélette America tel qu’il a été retracé par André Aversa. Noter, en bas à gauche, le tableau permettant de calculer les faux équerrages des membrures à partir des diagonales I, II et III. © coll. André Aversa

Il réalise d’abord un marbre pour supporter la quille de cette réplique qui mesurera 2,60 mètres hors tout, puis se lance dans les premières découpes. « Durant la construction du Gabès, j’avais commencé à stocker et à sécher du bois pour la goélette, comme on le fait sur un chantier. J’avais aussi rassemblé le matériel nécessaire à sa construction, ce qui m’a fait gagner beaucoup de temps. » En avril, il peut commencer à assembler la structure axiale sur son support, de telle sorte que la ligne de flottaison soit horizontale. Ainsi la pose des membrures, puis des cloisons, se fera-t-elle parfaitement à la verticale.

Juillet voit la réalisation des gabarits de la membrure avec une échelle de relèvement – une planche ajourée qui permet de relever sur plan la courbe de chacune d’elles et de la reporter sur les gabarits. Ceux-ci sont numérotés et les indications d’équerrage y sont reportées sur toute leur longueur.

Le modèle est retourné pour être bordé

En septembre 2014, André s’attaque à la réalisation des couples qui, sur l’America, sont doubles. Les pièces qui les constituent sont toujours un nombre impair (7, 9 ou 11). Une fois tracées et débitées avec l’aide de Madame Aversa, celles-ci sont assemblées. Puis les couples sont fixés à la quille et le charpentier vérifie qu’ils sont bien en place à l’aide d’un fil à plomb et d’un cordeau. L’ensemble est maintenu par des lisses qui seront ensuite supprimées.

Des épontilles sont aussi positionnées à tribord et à bâbord, ainsi que des entretoises toutes les trois ou quatre membrures pour parer à toute déformation de la charpente. Puis vient la pose des préceintes. « C’est une opération très importante, car ce sont elles qui donnent la tonture, précise André Aversa. Une fois qu’on les a posées, on ne pourra plus revenir en arrière. »

En avril 2015, il commence enfin la pose des bordages. Avec précaution, le modèle a préalablement été retourné, quille en l’air. « Il faut bien qu’on ait quelques avantages à construire à échelle réduite », plaisante André. Il gagne un peu de temps en traçant, puis en usinant simultanément les bordages tribord et bâbord. Le bordé est ensuite poncé et peint, coque toujours retournée, et la ligne de flottaison est matérialisée. En janvier 2016, André débute la pose du barrotage après avoir remis la goélette à l’endroit.

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La coque de la goélette est remise à l’endroit pour poser le barrotage. © Mélanie Joubert

« Puis je marque les emplacements des jambettes en fonction des têtes de membrures et je les trace sur les préceintes. Ensuite, je trace et je pose les plats-bords après avoir réalisé le passage des jambettes, qui doivent prolonger les formes de la coque. Leur balancement s’effectue à l’aide d’un liteau. On peut alors installer claires-voies et descentes et ponter le bateau. »

En août, le chantier est bien avancé et André passe à la réalisation des espars. Quatre mois plus tard, il en est au pouliage et aux ferrures : « J’ai fabriqué toutes ces pièces d’un coup, pour gagner du temps », précise-t-il. Début 2017, malgré quelques problèmes de santé, il poursuit ses travaux à un rythme soutenu. Il doit maintenant s’attaquer au gréement, un domaine qui n’est pas son cœur de métier et qui va lui demander beaucoup de recherches.

« Pendant toute la construction, je me suis notamment demandé pourquoi les deux mâts de la goélette étaient penchés sur l’arrière, raconte-t-il. À y regarder de plus près, on voit que le centre de voilure et le centre de carène sont sur la même verticale, aux deux tiers de la longueur du bateau, là où la coque est la plus portante. Si les mâts avaient été verticaux, la poussée se serait portée davantage sur l’avant et aurait fait piquer le bateau. Or, il a une étrave très fine, propice à l’enfournement… George Steers savait ce qu’il faisait ! »

Pour les voiles, André Aversa réalise d’abord un patron sur un papier un peu épais. Elles sont découpées peu après dans une toile de coton très fine pour respecter le matériau et le grammage des voiles de la goélette originale, puis il les ralingue avec un petit cordage, à l’exception des bords de fuite. Un travail minutieux.

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Le pont, l’accastillage et le gréement ont demandé deux fois plus de temps que la coque, tout devant être à la bonne échelle. © Mélanie Joubert

Un drapeau américain avec trente et une étoiles

Il faut, là encore, soigner le moindre détail et fabriquer à l’échelle des pièces introuvables dans le commerce. « On n’imagine pas le temps qu’il faut pour créer tout cela ou pour coudre les voiles », note le charpentier. Il doit notamment façonner dans des tuyaux les colliers qui guideront les bords d’attaque des voiles sur les mâts. « Pour les œillets, ceux des garcettes de ris par exemple, j’ai dû également trouver du tuyau de moins d’un millimètre de diamètre et le débiter pour fabriquer six cents bagues d’un millimètre d’épaisseur ! Puis j’ai créé un outil pour les emboutir à partir d’un emporte-pièce. Il ne me fallait que trois cents œillets, mais j’en ai fait le double car il y avait beaucoup de ratés ! Finalement, la réalisation du gréement m’a pris deux fois plus de temps que celle de la coque et cela m’a occupé l’esprit à plein temps ! »

Jusqu’au bout, il conservera le souci de construire une copie conforme de la goélette. « Pour le pavillon américain, il me fallait trouver un drapeau de presque 10 centimètres de large. A priori, c’était facile, mais les choses se sont compliquées lorsque j’ai réalisé que les États-Unis ne comptaient que trente et un États en 1851 ! Où trouver un drapeau à la bonne échelle et avec trente et une étoiles ? Là encore, il a fallu le fabriquer. »

Au total, André Aversa aura consacré plus de dix mille heures à la construction de la goélette, mais la durée du chantier, qu’il avait estimée à sept ans, a été ramenée à quatre ans au prix d’un travail acharné. En attendant de trouver acquéreur, son œuvre – présentée pour la première fois au public en 2018 lors d’Escale à Sète – reste exposée au Parlement de la mer de la région Occitanie. Le talentueux charpentier peut avoir la satisfaction du devoir accompli.

 

Le charpentier de marine sétois André Aversa nous présente sa maquette de l’America, la célèbre goélette américaine qui remporta la Coupe de l’America de 1851.  Voir la vidéo